le 26/04/2018
-De la main à la main ou de compte à compte, ce geste de solidarité est souple, facile et rapide à mettre en place. Pourtant, il n’en constitue pas moins un acte juridique encadré, qui impose des précautions au prêteur comme à l’emprunteur.
Pour aider un enfant à constituer l’apport de son premier achat immobilier, pour éviter des difficultés de trésorerie passagères à un proche, vous proposez votre aide en optant pour une solution facile : lui prêter de l’argent.
Veiller à constituer une preuve
Sur le plan formel, la loi n’impose aucune formalité civile aux parties. Vous êtes libre de rédiger ou non une reconnaissance de dettes sur un bout de papier, de rédiger ou non un contrat en bonne et due forme.
La liberté contractuelle est large : prêteur et emprunteur déterminent ensemble le montant du prêt, son échéance, son éventuelle rémunération par des intérêts et le mode de calcul de ces intérêts (dans la limite de l’usure).
Bien que la rédaction d’un écrit ne soit pas obligatoire, elle est fortement préconisée. En effet, en cas de contestation, l’écrit servira au prêteur à prouver sa créance et exiger son paiement auprès de l’emprunter, ses héritiers ou en justice. Pour le prêteur, c’est le moyen de prouver le montant exact de sa dette et la nature de ce transfert d’argent.
Si votre prêt est d’un montant supérieur ou égal à 1500 euros, l’article 1359 du Code civil impose que la preuve soit apportée par écrit. Il doit donc s’agir d’un contrat signé par les deux parties (acte sous seing privé), qui peut être contresigné par un avocat, ou bien d’un acte passé devant notaire. Il est également possible de la faire enregistrer par le service des impôts pour lui donner date certaine.
Evidemment, les circonstances familiales peuvent rendre moralement impossible la rédaction d’un tel acte (contrat ou reconnaissance de dette). Dans ce cadre, le juge admet que la preuve puisse être apportée par tout moyen : témoignages, correspondance etc…
Nombreuses obligations fiscales
La loi fiscale est en revanche plus exigeante que la loi civile. Elle impose en effet la déclaration de certains prêts.
– Les obligations de l’emprunteur : celui-ci doit déclarer au service des impôts l’emprunt contracté auprès d’un particulier dont le montant dépasse 760 euros. S’il a contracté plusieurs emprunts de montant inférieur à ce seuil mais dont le total dépasse ce seuil, la déclaration s’impose.
– Du côté du prêteur : si vous prêtez à une personne une somme supérieure à 760 euros, c’est votre débiteur qui s’occupe de déclarer le prêt ? En revanche, si vous accordez plusieurs prêts à des personnes différentes d’un montant unitaire inférieur à 760 euros et que le total dépasse ce seuil sur une année, vous devez procéder à une déclaration globale.
Ces déclarations s’effectuent, via le formulaire Cerfa n°2062, au moment de la déclaration annuelle de revenus, sous peine d’amende de 150 euros.
Enfin, si le prêt est rémunéré, le prêteur doit déclarer les intérêts perçus sur sa déclaration annuelle de revenus, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Attention à l’intention libérale
Sachez que l’administration fiscale est très attentive à ce que ce transfert d’argent ne constitue pas en réalité une donation d’argent. Elle n’est pas liée par la qualification de prêt que vous aurez donné au virement bancaire, et peut démontrer qu’il s’agit d’une donation si tel est le cas.
La distinction entre le prêt et la donation repose sur la dépossession, temporaire dans le prêt, définitive avec la donation. La donation sous-entend également l’intention libérale du donateur, c’est-à-dire sa volonté de procurer un avantage sans contrepartie.
Dès lors, l’administration examine la sincérité de l’opération au regard de circonstances. Un virement d’argent réalisé par une personne d’un âge très avancé, accompagné d’un échéancier qui s’étend sur de nombreuses années, ne permettant pas le remboursement de la dette du vivant du prêteur fait douter de sa qualité de prêt. De même un prêt remboursable in fine à 10 ans, et dont le terme a été plusieurs fois repoussé, sans qu’aucun remboursement ne soit intervenu encourt la requalification en donation. Conséquence : exigibilité des droits de donation assortis d’intérêt de retard et de pénalités.
A noter que lorsque les parties appartiennent à la même famille, c’est à l’administration fiscale qui conteste la qualification de prêt de démontrer qu’il n’en est pas un. La notion de famille s’entend ici des ascendants et descendants, oncles et tantes, neveux et nièces, concubins, et partenaires de Pacs.